Quatre
heures du matin. Les vagues qui agitent mon ventre m’ont détournée de mes
rêves. Encore toute embrumée par leurs images, je flotte dans un demi-sommeil.
Il fait silence. Seul le souffle apaisant de mon amoureux vient rythmer la noirceur.
Mon
enfant et moi sommes seuls. Ensemble. Ses vagues sont vives, je les
accueille, attendrie, perchée sur ce mince fil des sens qui nous relie dans la
nuit. D’elles-mêmes, dans un geste de toutes les mères, de tous les temps, mes
mains viennent se poser contre la vie, enveloppant de leurs paumes la
merveilleuse vigueur de cet être qui est à la fois un peu moi et déjà
quelqu’un. À l’écoute. Des sursauts, des chatouillements, d’une de ces vastes
et longues caresses de l’intérieur, d’une bulle à peine sentie sous le nombril.
Peut-être est-il en train d’accomplir ce petit miracle que j’attends depuis
tant de jours déjà, celui de se mettre en place pour la grande sortie. Et je
prie, je prie bébé pour qu’il se retourne, je l’encourage, je l’incite. Et puis
je comprends que ça n’est pas ça. Il joue, simplement ! Il découvre,
s’amuse, touche les confins de son univers liquide, en explore les frontières,
la souplesse, danse dans cette eau qui l’enveloppe. Il réagit aux sons qui lui
sont probablement devenus si familiers, le lent ressac de mes inspirs et de mes
expirs, mon cœur aux pulsations désordonnées, imprévisible mais bien solide, ma
voix qui vibre contre ma chair, cette voix qu’il connaît de l’intérieur, et
puis tous ces craquements et ces bruits d’eau et d’air, de cordages, de boyaux
et d’os que de l’extérieur on remarque à peine, tous ces signes que la grande
caravelle est en route… depuis trois saisons déjà.
Et
alors que l’enfant joue et que l’on écoute, on comprend que ce grand voyage en
symbiose tire à sa fin. Que le petit être
pour qui nous avons été tout l’univers pendant déjà huit mois s’apprête
à découvrir le grand, l’immense, l’infini, à y vivre, à s’y écorcher les genoux
et le cœur, à y recevoir tellement et à donner tout autant…
Mais
pour l’instant, savourer être une planète. La planète Mère. Être à la fois le
Ciel et la Terre de celui qui vit dans mon ventre en cette nuit de février,
immergé dans toute cette chaleur, cet amour fluide et mouvant mille fois plus
grand que moi-même. Et mes paumes et mes yeux sont mouillés d’émotion et de
tendresse d’écouter jouer mon petit homme, là, tenant entre mes mains la
rondeur de son univers.
Que c'est beau! tellement plein d'amour et de tendresse. je savoure moi aussi
RépondreSupprimerTrès chère DamO,
RépondreSupprimerOn parle ici d'un texte magnifique.
Il y a parfois en soi des fenêtres qui s'ouvrent sur l'excellence. On la contemple à mesure qu'on y travaille, mais sans, et de cela on s'émerveille, avoir l'impression d'offrir autre chose que ce qui coule d'évidence dans toutes les lieux de notre corps.
Dire.
Il y a parfois en soi des moments qui exigent le partage, à défaut de quoi le temps même devient une trahison. Quand tout ce qui concourt à l'extase est soi comme asile et nourriture autour de soi autre déjà, mais à jamais sien jusqu'à la mort, l'on sait combien la vie a désormais la forme et la force de ce qui nous habite comme une fin.
Vivre.
Il y a parfois en peluche un ours qui lit des histoires d'amour de mère en sachant très bien que la séparation est un mot qui n'aura qu'un temps. Quand il les relit, il a envie de les avoir écrites. Parce qu'il sait très bien que ces histoires n'en sont pas. La vérité mise en mots est une œuvre que peu d'artistes savent achever.
Être.
Merci.
C'est un véritable REGAL que de te lire..
RépondreSupprimerLe texte sur la PLANÈTE MÈRE est un petit bijou épistolaire.
Ta description de ce moment d'intimité avec Louis est une vraie méditation...
Beau! Beau! Beau!
Quand Louis sera là à compétionner avec le TRIO-À-PLUMES....tu auras certainement moins le temps d'écrire. Je te le dis tout de suite...ça va me manquer.
Câlins et merci de nous faire réaliser à ta manière comme c'est beau la Vie...même minuscule et cachée..
Reine
encore une fois tu me jettes à terre...heureusement que je n'ai pas ton corps sinon j'aurais de la misère à me relever!!!à quand la publication? ça se peut pas comme tes mots sont fluides comme un petit ruisseau.
RépondreSupprimertu es due quand?
si tu te mets la tête en bas et les pattes en l'air...va-t-il se retourner? si oui il a l'esprit de contradiction si non il a tout un caractère...héhéhé
Et à des milliers de kilomètres, une cousine vit et ressent la même chose que toi, et ô Dieu, comme elle te comprend...
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